Corinne Cahen au sujet des femmes dans l'entrepreneuriat

"Les femmes ne peuvent pas être spectateurs"

Entreprises magazine: Pouvez-vous nous raconter comment se passe une proposition de faire partie du gouvernement? Choisit-on son ministère?

Corinne Cahen: Cela s’est passé par téléphone. J’ai reçu ce coup de fil de Xavier Bettel alors que je ne m’y attendais pas du tout. Quelques jours auparavant nous avions eu l’occasion de parler de mon nouveau rôle de députée et rien ne m’avait laissé penser qu’il avait éventuellement un autre projet à me proposer. J’ai participé aux groupes de travail mis en place durant les discussions de coalition. Je faisais partie du groupe Economie, Recherche, Travail et Emploi, sous la présidence d’Étienne Schneider. J’ai d’abord refusé les premières propositions qui m’ont été faites. Je voulais un ministère qui me concerne de près, qui me motive et auquel j’étais sûre de pouvoir apporter quelque chose, comme celui de la Famille.

Entreprises magazine: Comment avez-vous organisé la transition entre votre ancienne vie et vos nouvelles responsabilités?

Corinne Cahen: J’avais commencé à prendre des décisions suite à mon élection en tant que députée. J’ai donc juste accéléré le mouvement. J’ai démissionné de mon poste à la Chambre de Commerce, rôle qui est légalement incompatible avec celui de député. J’ai confié la direction de Chaussures Léon à mon époux. Le contact avec les clients et les équipes des magasins me manque un peu mais, grâce à lui, j’en entends parler tous les soirs. Je compte bien m’investir encore un peu dans le choix des collections. Mon ministère ne m’oblige pas à planifier de nombreux déplacements et c’est ce que je voulais pour pouvoir rester proche de ma famille. Maintenant, je travaille moins le samedi, mais,

par contre, j’ai perdu mes mardis et jeudis après-midi avec mes filles. C’est donc leur père qui assure les accompagnements aux activités.

Entreprises magazine: Pensez-vous déjà à la suite?

Corinne Cahen: Oui, il le faut. On n’endosse pas un rôle politique pour toute une vie. Je n’aurais pas accepté d’entrer au gouvernement s’il m’avait fallu renoncer à la propriété de mes magasins, comme il en a été question. Ils sont ma garantie de pouvoir retrouver une activité à l’issue de mon mandat. Pour moi, le mandat politique idéal devrait  durer 2 législatures : la première pour initier les réformes nécessaires  et la deuxième pour les mettre en œuvre et récolter les fruits de ces actions. Mais je prends surtout la  vie comme elle vient, en regardant l’avenir plutôt que le passé.

Entreprises magazine: y-a-t-il des points communs entre l’entrepreneuriat et la politique?

Corinne Cahen: En tout cas il y a des éléments de mon expérience entrepreneuriale que je souhaite transposer dans l’exercice de la politique. Dans la façon de gérer les dépenses, par exemple. Dans ma vie de cheffe d’entreprise, chaque euro dépensé venait de ma poche et je devais l’utiliser au mieux. Je tiens à faire passer l’idée que l’argent public, qui est celui des contribuables, doit être dépensé avec encore plus de prudence. Il ne nous appartient pas. On nous en confie la gestion. J’ai aussi l’ambition d’insuffler un véritable esprit d’entreprise au sein du ministère avec, notamment, des actions de teambuilding. Je reste fidèle à moi-même.

Entreprises magazine: Est-ce l’un de vos souhaits de porter la volonté des femmes d’être davantage reconnues dans le monde politique et économique?

Corinne Cahen: J’espère en effet pouvoir contribuer à faire évoluer le regard porté sur les femmes qui s’investissent dans leur travail. J’ai toujours été très active et j’ai toujours été attaquée par des femmes qui jugeaient qu’il valait mieux rester à la maison pour élever ses enfants. Or, j’ai toujours vu ma mère travailler et cela ne m’a pas traumatisée. Au contraire, cela a forgé ma conviction que les femmes peuvent s’épanouir professionnellement et doivent conquérir leur indépendance financière. Les femmes ne peuvent pas être spectateurs. Si elles veulent que le monde professionnel change et les prenne mieux en compte, c’est à elles d’agir.

 

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